Revenir au site

Du bon usage de la langue de bois ?

28 février 2021

La novlangue (plus couramment appelée langue de bois) est la langue officielle d'Océania, inventée par George Orwell pour son roman d'anticipation 1984 (publié en 1949).

C'est une simplification lexicale et syntaxique de la langue destinée à rendre impossible l'expression des idées potentiellement subversives et à éviter toute formulation de critique de l’État, l'objectif ultime étant d'aller jusqu'à empêcher l'« idée » même de cette critique.
Extrait Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Novlangue
Depuis de nombreuses années nous avons assisté en politique à de magnifiques démonstrateurs de l'usage de la langue de bois (Sarkozy, Hollande, Valls, Macron,...).

A quoi sert la novlangue ?

Quel est l'intérêt de la novlangue ?

  • elle donne de l'espoir, elle permet de continuer à rêver à un monde meilleur
  • elle joue avec nos émotions, nous materne
  • elle rassure, elle protège de toutes les difficultés du monde et de ses inégalités
  • c'est tiède, c'est moins transparent, c'est moins net et plus flou
  • elle force à avoir un comportement hypocrite, à se voiler la face
  • elle permet de toucher plus de gens, d'augmenter l'audience
  • elle atténue les inégalités, renomme la réalité de manière positive, c'est la positive attitude
  • elle permet de masquer les conflits d'intérêts, les désaccords politiques et moraux quant à la subsistance d'inégalités entre les gens
  • elle permet de parler sans rien se dire en donnant l'impression d'être intelligent
  • elle décale les minorités et culpabilisent ceux qui pensent différemment
  • elle diminue la capacité d'indignation, supprime les jugements de valeurs et permet d'accepter l'inacceptable

Nous avons la chance d'avoir en France un expert de cette novlangue appelée plus couramment langue de bois

Franck Lepage, né à Paris le , est un militant de l'éducation populaire, notamment connu pour avoir créé le concept de « conférences gesticulées ».
Franck Lepage est membre de L'ardeur, a
ssociation d’éducation populaire politique, située à Nantes.

Association L'ardeur

Depuis une quinzaine d’années, le renouveau de l’éducation populaire accumule théorisation, méthode et expériences multiples dans de nombreux secteurs. Aujourd’hui il « fait mouvement » autour des valeurs fortes d’émancipation et de lutte contre la domination d’un capitalisme toujours plus cynique, parce qu’il s’impose partout comme le seul modèle possible.

Ce système mortifère d’accumulation illimitée et d’appropriation privée aux dégâts innombrables prospère par sa capacité à investir non seulement le champ économique, mais, dans une accélération toujours plus vertigineuse, tous les champs de l’activité humaine, qu’elle soit publique, privée, matérielle ou spirituelle.

C’est face à ce rouleau compresseur que les militants de ce renouveau de l’éducation populaire ont résisté en développant des moyens qui visent à rendre lisibles aux yeux du plus grand nombre les rapports de domination, les antagonismes sociaux, les rouages de l’exploitation.

L’ardeur s’inscrit aujourd’hui dans ce mouvement avec une mission précise d’engagement dans le monde militant pour coopérer à une transformation sociale, et reprendre ainsi la main face aux visées de la domination toujours à l’œuvre.

Nous voulons forger ces alliances sur la base du programme suivant :

S’approprier notre histoire

Parce que des pans de notre histoire sont usurpés ou volontairement maintenus dans l’oubli. Parce que les luttes collectives passées peuvent redoutablement outiller celles en cours et celles à venir. Parce que la connaissance de l’histoire permet d’anticiper, d’identifier les régressions dans les modernisations annoncées, et d’échapper à la fatalité en comprenant que le naturel est un construit qui peut donc être défait. Parce que nous comprenons et assumons le caractère central de notre histoire et des combats qui nous ont précédés, et parce que nous voulons prolonger leurs conquêtes, celles qui ont fait reculer concrètement le capitalisme, nous nous donnons comme priorité l’appropriation de notre histoire. Que l’identification du « déjà-là » qui subvertit le capital rende crédible et possible une autre façon de faire société, et que la connaissance de l’histoire des conquêtes nous donne les moyens de les actualiser.

Combattre avec le Langage

Parce que les mots ne sont jamais neutres ni purement informatifs, qu’ils produisent des effets sur nos façons de penser et d’agir sur le réel, parce que la disparition de certains ne doit rien au hasard, que d’autres se propagent et qu’en les employant nous légitimons à notre insu ce que nous combattons, nous sommes déterminés à interroger l’apparente innocence des mots et leur supposée évidence, à décortiquer leurs sens, à révéler d’où ils viennent, l’idéologie et les intérêts dont ils sont porteurs, à construire la résistance à ceux qui nous asservissent et la réhabilitation de ceux qui nous émancipent. Que le travail sur le langage devienne ce qu’il doit être : une dimension essentielle et concrète de notre lutte politique.

Renforcer le pouvoir d’agir

Parce que nous voulons contribuer au renforcement d’un pouvoir d’agir non réductible à la critique et à la résistance, mais entendu comme offensive et capacité d’élaboration d’une autre façon de faire société, nous travaillerons à ce que la connaissance sorte des livres pour servir les luttes, et que les savoirs sociaux stratégiques, essentiels à la transformation sociale, dont nous sommes tous détenteurs, soient partagés. Que les savoirs livresques et d’expérience politique nous permettent de comprendre les logiques de domination, mais surtout de nous en affranchir.

Faire collectif

Parce qu’il n’est plus rare de croiser des militants et des travailleurs isolés, en souffrance, découragés voire fatalistes, nous voulons contribuer à penser et à réunir les conditions du réveil du désir politique, de son maintien dans la durée, de la pérennité des collectifs et de la solidarité de leurs membres. Que l’émotion soit mobilisatrice, les savoirs émancipateurs, et que leur transmission rassemble.
 

Source : http://www.ardeur.net/

Ateliers de désintoxication de la langue de bois

Atelier pouvant être mis en lien avec la conférence de Franck Lepage Inculture(s) 1 « L’éducation populaire, Monsieur, ils n’en ont pas voulu » – Une autre histoire de la culture.

Objectifs

Parce que les manipulations du langage dans nos relations institutionnelles (CAF, Pôle emploi…), politiques (média, vie politique…) et surtout professionnelles (nouveau management, protocoles, démarche qualité, évaluations, compétences…) modifient notre perception du monde et plus encore la perception de nos métiers et visent à les détruire… Un atelier pour identifier les différentes formes de manipulation, s’exercer à les comprendre et les déconstruire, et imaginer les résistances collectives.

Attention : contrairement aux stages de réalisation, nous n’organisons pas d’ateliers en intra où les personnes peuvent s’inscrire individuellement. C’est toujours une structure qui nous fait intervenir pour l’animation de l’atelier… elle mobilise ensuite ses réseaux, ses adhérents, ses militants en les invitant à prendre part à l’atelier.

Contenus

  • Révision des formes de style de la langue de bois : euphémismes (dégâts collatéraux), oxymores (croissance négative), antiphrases (plan de sauvegarde de l’emploi), faux-amis (réforme), anglicismes (coach), sigles (RGPP), technicisateurs (technicien de surface), enjoliveurs (hôtesse de caisse), pléonasmes (démocratie participative), faux-ennemis (charges sociales), etc.
  • Analyse des lieux d’élaboration de ces éléments de langage : les « think-tanks »…
  • Atelier d’écriture de langue de bois : demande de non projet, dépôt de non-subvention, Ridiculum Vitae, détournements de sigles, traductions, thèmes, on ne dit plus – on dit, fiches de poste en non langue de bois, etc.
  • Inventaire de résistances et stratégies concrètes de contre-offensive sur le langage.

Méthode pédagogique

  • Travail en plénière et en sous groupes.
  • Ateliers d’écriture.
  • Indications bibliographiques.
  • Topos explicatifs.
  • Recueil et analyse de témoignages.

Public : Tout public
Durée : ½ journée (de 4h00) ou 1 journée
Modalités et tarifs : contact@ardeur.net
 

Source : http://www.ardeur.net/ateliers/atelier-desintoxiquer-le-langage/

Quelques exemples de langue de bois

  • Les euphémismes 
    Les frappes chirurgicales de l'armée américaine,
    Les pauvres devenus des publics défavorisés puis fragilisés,
    on ne dit plus « domination masculine », on dit « inégalités hommes-femmes »
    on ne dit plus « fille-mère », on dit « parent isolé »
    Plan de sauvegarde de l'emploi pour plan social
  • Hyperbole
    Quand des ouvriers font grève, ils prennent les usagers « en otage ».
  • Les sigles
    Les ZUS, ZEP, ZRR, CUCS et autres. Ce ne sont plus des quartiers populaires ou des ghettos de pauvres mais des zones sensibles (les autres quartiers seraient donc insensibles ?) à revitaliser en priorité, ça donne plutôt envie d'aller y habiter.
  • Les Oxymores
    Discrimination positive
    Egalité des chances
    Entreprise citoyenne
    Flexi-sécurité
    Capitalisme moral
    Croissance négative
  • les Pléonasmes
    Démocratie participative
    Participation citoyenne
    Citoyenneté active
  • Tautologie
    « 100% de nos clients achètent nos produits. »
  • Les Anglicismes
    Les petits boulots renommés job
    Gender mainstreaming pour « approche intégrée de l'égalité des femmes et des hommes »
  • Les Concepts Opérationnels
    Démarche-qualité
  • Les technicisateurs
    Ambassadeur de tri pour distributeur de sacs poubelles
  • Néologisme et barbarisme
    « Acter » une décision
  • Les faux-amis
    Démocratie
  • Les faux ennemis
    Charges sociales

Sources :
Guide de désintoxication de la langue de bois
Dictionnaire collectif de la langue de bois

Cours de langue de bois ;-)

Les bonnes pratiques de la langue de bois

Animer un atelier de désintoxication de la langue de bois

Bonus

A l'occasion de cette référence à la novlangue, je vous recommande vivement ce film Arte qui raconte l'histoire croisée de George Orwell et d'Aldous Huxley, les auteurs des deux grands romans d'anticipation : "1984" et "Le meilleur des mondes".
Écrits il y a plus de 70 ans, ces deux romans trouvent un écho extraordinaire dans nos sociétés d'aujourd'hui : faits alternatifs, fake news, ultra-surveillance...
Orwell et Huxley semblent avoir imaginé toutes les dérives de nos sociétés.