Revenir au site

Et si nous survivions ? de Charles Eisenstein

19 février 2021

Je peux difficilement cacher mon admiration pour Charles Eiseintein, une des personnes qui représente le mieux ce que je comprends d'une culture régénératrice.
Charles Eisenstein est essayiste, conférencier et avocat de l'économie du don (https://en.wikipedia.org/wiki/Charles_Eisenstein)

On ne cesse d'entendre que l'extinction de l'homme est possible au cours de notre vie.
Que si nous ne changeons pas rapidement de cap, si nous ne décarbonons pas nos économies, si nous ne plantons pas d'arbres et si nous n'extrayons pas le carbone de l'air, cette civilisation humaine pourrait bien prendre fin.

Mais que se passerait-t-il si ce n'était pas vrai ?
Et si nous pouvions survivre ?

A quel genre de monde souhaitons-nous donner naissance ?
A un monde de béton où nous serions enterrés solitaires pour résister aux flux solaires, ou bien plutôt à un monde vivant où la coopération et la solidarité nous permettraient de trouver un nouveau sens à notre vie, malgré des conditions difficiles ? Si nous racontions ce récit, alors nous inviterons le monde à être de plus en plus vivant.

Il ne suffit pas seulement de gagner sa vie et de survivre.

Faire d'une contrainte un choix : telle est l'invitation de Charles Eisenstein

Faire d'une contrainte un choix

Selon Charles Eisenstein, la crise engendrée par le coronavirus montre notamment qu’un changement d’une rapidité phénoménale est possible, lorsque l'humanité se rassemble derrière une cause commune. Elle démontre la puissance de notre volonté collective, dès que nous nous mettons d'accord sur ce qui est important.

D’abord, il est juste de nous arrêter, stupéfaits par la nouveauté de la situation et contraints de constater que ce que nous avons pu croire être la normalité est rompue. Il est utile, aussi, de se rappeler que nos problèmes proviennent de désaccords entre nous. Et il est enfin visible partout, quand une cohérence (au sens ondulatoire) s’installe, les pouvoirs créatifs de l'humanité sont sans limites.

Lorsque la crise se calmera, nous pourrons peut-être nous demander si l’on veut revenir à la normale, ou si l’on a aperçu quelque chose pendant cette interruption de la routine que l’on veut emporter pour cheminer vers l’avenir.

Car, parmi les cent chemins qui partent dans toutes les directions devant nous, certains mènent vers celle que l’on a déjà empruntée. Certains mènent à l'enfer sur Terre. Et d'autres conduisent à un monde dont la guérison et la beauté dépassent tout ce que l’on n'a jamais osé croire possible.

Que pourrait-on accomplir d'autre, en nous mettant ainsi en état de cohérence ?

Que voulons-nous accomplir, et quel monde allons-nous créer ?

C'est faire d'une contrainte un choix. Et c'est toujours la question qu’apporte l’éveil d’une personne à son propre pouvoir.

Et si nous survivions ?

La vidéo What if we survive ? a été remixée à partir de la série de vidéos :
"Climate : Inside and Out" - https://charleseisenstein.org/program/series/climate/

Transcription de la vidéo

Le récit dominant que j'entends aujourd'hui, encore et toujours à travers les grèves des jeunes pour le Climat et toutes les autres actions, c'est que nous devons changer ou bien nous risquons de ne pas survivre.
Nous avons déjà dépassé la capacité des écosystèmes de la Terre pour soutenir la civilisation humaine et nous ferions mieux de faire quelque chose tout de suite ou bien nous allons subir une catastrophe - un effondrement massif de la population, peut-être même l'extinction de l'humanité.
J'aimerais que notre conversation se détourne de la question de savoir si nous effectivement allons survivre. Mais qu'elle se focalise plutôt sur : "Comment allons-nous survivre ?"
Le but de la vie n'est pas de survivre.
Imaginez un avenir où la planète entière serait essentiellement convertie en une grande mine à ciel ouvert et une décharge.
Où la mort des arbres continuerait. Comme celle des baleines, des poissons, des espèces, les unes après les autres. Et celle des écosystèmes. Et celle des insectes.
Et si nous continuions à survivre, mais dans un monde de béton.
Si nous remplacions tout ce qui disparaît par des substituts technologiques.
Si nous fabriquions de l'oxygène, peut-être dans des cuves d'algues ou quelque chose comme ça.
Si nous abaissions, avec des machines, le taux de carbone, pour maintenir l'équilibre atmosphérique.
Si nous enfermions nos villes dans des bulles.
Et si nous pouvions survivre, dans un monde totalement empoisonné, grâce à des filtres efficaces.
Et si nous pouvions faire cela ?
Qu'est-ce qui nous en empêcherait ?
N'est-ce pas une question beaucoup plus importante ?
Car, en fait, nous marchons sur cette voie depuis très longtemps.
Nous ne voyons le monde que comme l'instrument d'une conception étroite du bien-être des êtres humains.
Si nous continuons à maintenir le récit de ce monde-là, d'une chose morte, d'un unique source de ressources, de nos déchets, alors nous allons vraiment créer un monde mort.
Nos récits sont nos outils de création les plus puissants.
Ils nous disent qui nous sommes et pourquoi nous sommes ici.
Et peut-être devrions-nous remplacer la rhétorique de : "Nous ferions mieux de changer ou bien nous ne survivrons pas".
Imaginez si ce n'est pas vrai et si les gens le ressentent comme tel.
Je veux dire que vous pouvez lire autant de science que vous voulez.
Vous pouvez lire tout ce que vous voulez sur la boucle de rétroaction du méthane, et sur tout le reste.
Mais croyez-vous, vraiment, que nous allons disparaître en 20 ans ?
La plupart des gens n'y croit pas vraiment.
S'ils y croyaient vraiment, ils n'agiraient pas comme ils le font maintenant.
La question importante n'est donc pas de savoir :
"Que devons-nous faire pour survivre ?",
mais plutôt :
"Dans quel monde souhaitons-nous vivre ?"
Ceci nous permettrait de reconnaître le pouvoir de nos choix et le pouvoir de nos récits.
Le pouvoir du récit : le monde est vivant.
Si nous racontons ce récit, alors nous inviterons le monde à être de plus en plus vivant.
Il ne suffit pas de gagner sa vie et de survivre.
Les jeunes gens souhaitent savoir, d'abord, pourquoi ils sont ici.

Pour aller plus loin

J'adore particulièrement ces deux essais :

  • Extinction et la Révolution de l'Amour  (janvier 2020), un texte majeur sur notre époque
    "Tout acte de guérison, aussi petit soit-il, est une prière, une déclaration annonciatrice du monde qui sera. Peut-on se connecter à notre amour pour cette planète vivante, blessée, et canaliser cet amour à travers nos mains et nos esprits, notre technologie et nos arts, en se demandant : Comment allons-nous participer au mieux à la guérison et au rêve de la Terre ?"
  • Le Couronnement  (mars 2020), une réflexion sur le coronavirus
    "Il existe une alternative au paradis du contrôle absolu après lequel notre civilisation a couru si longtemps, et qui s’éloigne à la même vitesse que l’avancée du progrès, tel un mirage à l’horizon. Bien sûr, on peut continuer comme avant sur la voie vers toujours plus d’isolement, de domination et de séparation. On peut rendre normaux des niveaux de séparation et de contrôle accrus, croire qu’ils sont indispensables pour assurer notre sécurité et accepter un monde dans lequel nous avons peur d’être proches les uns des autres. Ou bien on peut profiter de cette pause, de cette rupture dans la normalité, pour nous tourner vers un chemin de réunion, d’holisme, un chemin de rétablissement des connexions perdues, de réparation des communautés et de réunification à la toile du vivant."

Encore un peu plus loin

Un petit cadeau pour ceux/celles qui voudraient en savoir plus sur sa pensée :
son dernier livre Climate - a new story, résumé ici :
Et si le monde dont nous rêvons était en chemin ?
https://medium.com/@al.romanet/et-si-le-monde-dont-nous-r%C3%AAvons-%C3%A9tait-en-chemin-cd54465c160e

Sacred Economy / Économie sacrée de Charles Eisenstein.
La Monnaie, le Don et la Société dans l'Ère de la Transition
Le but de ce livre est de faire en sorte que l’argent et l’économie soient aussi sacrés que tout le reste de l’univers.
Introduction en français :
http://sacred-economics.com/economie-sacree-introduction/
Traduction libre et complète du livre par Alexandre Bessodes :
http://sacred-economics.com/wp-content/uploads/2012/01/SEFrench-Charles-Eisenstein-.pdf

Interview de Charles Eisenstein sur l'écologie, le climat et l'espoir :
Talking Ecology, Climate and Hope | Charles Eisenstein (février 2020)